« La soeur de Shakespeare » inspiré d' »Une chambre à soi » de Virginia Woolf. Un bijou joué au Théâtre « La flèche », sur une adaptation et une mise en scène de Juliette Marie. Une verve théâtrale et poétique portée par des comédiennes de grand talent!

Quelle belle surprise que la découverte de ce spectacle engagé; inventif et poétique , adapté pour le plateau par la talentueuse Juliette Marie entourée de magnifiques comédiennes Inès Amoura -Virginia Woolf- et Solenn Goix -La soeur fictive de Shakespeare nommée Judith-.

Dès le début, on se laisse prendre par la voix forte et déterminée de l’écrivaine incarnée ici avec brio : elle évoque la triste condition des femmes et de celles créatrices. Des femmes artistes jamais nées ou oubliées ! Que seraient -elles devenues si elles avaient exister, révélant leur talent potentiel et unique , si les maris , les hommes , leurs frères les avaient soutenus économiquement et intellectuellement ?

Comment auraient -elles marqué l’histoire elles aussi, si le monde de l’art, de l’écriture et le pouvoir masculin leur avaient ouvert les portes ?

De vraies questions dont Juliette Marie s’empare avec fièvre pour nous les projeter instantanément dans nos esprits. Dans son oeuvre Une chambre à soi , Virginia Woolf invente une soeur à William du nom de Judith. Une soeur qui se matérialise peu à peu sur le plateau dans un gestus douloureux en attente d’une gestation intérieure muette, ne demandant qu’à éclore…Pourquoi les oeuvres tant admirées de Shakespeare n’auraient pu être écrites par sa soeur ?

Quelle puissance obscure maintient ainsi depuis des siècles la femme créatrice et visionnaire derrière le rideau?

Etat qui perdure aujourd’hui malgré des progrès en Europe , mais avec un vrai recul dans certaines sociétés dont les plus modernes .Faut-il s’en inquiéter ? Cette pièce de théâtre intense et riche nous amène à réfléchir , sur nos droits, l’état de la relation homme/femme, le genre et le non genré. Pour exister, la femme devra t-elle encore se battre comme elle le fait depuis des siècles encore aujourd’hui ?

Ce spectacle est intense, rythmé par des tableaux et une bande sonore illustrant sobrement le propos mais de façon percutante. A souligner le décor fait d’un mannequin sans tête et d’une toile tendue parsemée de feuillets d’auteures inconnues ou totalement noyées dans l’histoire de nos civilisations. Le silence, les bancs jouent ici un rôle prépondérant comme pour faire écho aux pensées qui nous agitent au regard de ce drame féminin historique et sans fin qui se déroule sous nos yeux. Et si …?

Safia Bouadan

Distribution artistique

D’après Virginia Woolf.
Traduction : Jean-Yves Cotté.
Collaboration à l’écriture : Inès Amoura et Solenn Goix.
Texte et mise en scène : Juliette Marie.
Avec : Inès Amoura et Solenn Goix.
Collaboration Artistique : Sarajeanne Drillaud.
Compositions originales : Inès Amoura.
Conseils lumière : Janphi Viguié.
Travail sonore : Tom Ménigault.
Par la Compagnie Reme.

Photographie Christophe Raynaud De Lage
Durée : 1 h 05.
À partir de 14 ans.

Laisser un commentaire